Homélies pour le dimanche des Rameaux et de la Passion, le 2 avril 2023, en la cathédrale Notre-Dame de Reims - L'Eglise Catholique à Reims et dans les Ardennes

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Publié le 3 avril 2023

Homélies pour le dimanche des Rameaux et de la Passion, le 2 avril 2023, en la cathédrale Notre-Dame de Reims

Homélies pour le dimanche des Rameaux et de la Passion, année A, le 2 avril 2023, en la cathédrale Notre-Dame de Reims

Après l’évangile de l’entrée à Jérusalem

« Le Seigneur en a besoin ». Pourquoi une ânesse et son petit avec elle ? Il n’a pas besoin d’un destrier, d’un cheval de guerre, il ne vient pas pour écraser des ennemis. Plusieurs fois déjà il est venu à Jérusalem, il est entré dans la ville, il y a enseigné, il y a prié surtout, avec tout le peuple d’Israël. Cette fois-ci, il veut y entrer en roi, mais en roi d’un peuple en paix, en roi qui n’a pas à faire la guerre, à soumettre des peuples, à détruire des adversaires, il veut et peut entrer en roi pacifique, en roi qui apporte le bénéfice de la victoire remportée : « Dites à la fille de Sion : Voici ton roi qui vient vers toi, plein de douceur, monté sur une ânesse et un petit âne, le petit d’une bête de somme ». Il peut être humble, parce qu’il n’a pas à démontrer sa force ; il peut être doux, parce qu’il s’adresse au consentement de chacune et de chacun. Il entre dans la ville pour susciter la « fille de Sion » au sein de l’humanité.

Aujourd’hui, frères et sœurs, il a besoin de nous, il a besoin de notre accueil, il a besoin de notre confiance. Dans les temps troublés que nous vivons, où voir sa victoire ? Comment comptabiliser les bienfaits qu’il nous apporte ? Comment faire constater qu’il est, lui, Jésus de Nazareth, Crucifié et Ressuscité, le vainqueur de l’histoire ? A nous de consentir, encore et toujours au chemin paradoxal qui est le sien. A nous de proclamer, par notre bouche mais aussi par notre vie, par nos manières d’agir, de penser et d’être, qu’il est « celui qui vient au nom du Seigneur ». A nous de nous dépouiller de nos inquiétudes, de nos méfiances, de nos besoins envahissants, pour nous rendre aptes à accueillir sa force à lui et sa paix, comme il nous la donne.

Il a besoin aujourd’hui de la foi des catéchumènes qui, dans la nuit de Pâques, toute proche, dépouilleront le vieil homme pour revêtir l’homme nouveau. Il a besoin aujourd’hui de notre pénitence à nous, chrétiens de vieille souche, qui avons à secouer la poussière de nos péchés, grands ou minuscules, pour être davantage à lui. Il a besoin aujourd’hui du renouvellement de notre Église, qui a dû constater le mal, parfois porteur de mort, qu’elle a pu emporter avec elle et qui doit se réformer pour être vraiment l’Épouse du roi de paix. Il a besoin de notre espérance à tous, qui pourrions cultiver la nostalgie ou le ressentiment dans un monde sécularisé, perdu d’espoirs et déchiré, à qui nous pouvons manifester la joie de la conversion à laquelle il nous appelle et qu’il nous rend possible.

Regardons, frères et sœurs, ceux et celles qui, dans la foule de Jérusalem, se dépouillaient de leurs manteaux pour les étendre sur son passage ou qui coupaient des branches aux arbres pour en joncher sa route. C’est peu et c’est beaucoup. Ce roi-là, nous le savons, attend de nous que nous nous placions tout entiers sous sa seigneurie, en notre âme, en notre esprit, en notre corps, et ce roi-là se contente aussi du moindre mouvement de notre part.

Que les rameaux que nous portons et que nous exposerons dans nos maisons pour orner nos crucifix en gage de victoire expriment notre désir de l’accueillir davantage, d’année en année, jusqu’au jour où nous serons avec lui pour l’éternité, dans la Jérusalem de Dieu,

                                                                                                                                          Amen.

Après l’évangile de la Passion

« Le Maître te fait dire : ‘’Mon temps est proche’’ ». Son temps est proche. Après trente ans de vie cachée, après trois années à sillonner la Galilée, la Judée et même la Samarie, et parfois à déborder de leurs frontières, le temps est proche pour Jésus de l’acte ultime, non plus seulement de parler, d’enseigner, d’exhorter, et de consoler ou guérir tel ou tel, mais du don total et absolu, exprimé dans son humanité formée dans la longue tradition d’Israël et sa manière à lui d’en vivre, enrichie par les années passées, par les rencontres faites, par les discussions soutenues. Le temps approche de l’acte qui va percer une fois pour toutes le sombre couvercle qui enferme les humains dans la peur, dans le manque, dans la méfiance, et plus mystérieusement, dans le besoin de dire « non », dans le refus, qui sont la matière même du péché et que la mort exprime, pour y ouvrir le chemin vers la conversion, le pardon, l’alliance consentie généreusement, la vie, la lumière et la paix.

Le temps est proche pour lui d’assumer jusque dans sa chair tout ce qu’il y a de violence, d’injustice, de douleur, d’incertitude aussi, dans la condition concrète des humains, chez celles et ceux qui souffrent de maladie, chez celles et ceux dont la condition sociale est précaire, chez celles et ceux qui ne trouvent guère de consolation en cette vie. Le temps est proche pour lui de prendre cela qui justifie les réticences et les refus des humains et empêche de proclamer la bonté du Père sur ses épaules à lui et de s’y unir de tout son corps, de tout son être, jusque dans la profondeur de son âme et de son esprit, jusqu’à l’intime de sa liberté, de participer à tout ce qui peut susciter la révolte, pour tirer tout cela vers Celui qui l’a envoyé, pour en tout cela, devenir le Seigneur devant qui tout fléchit le genou.

Non seulement, lui n’a pas retenu jalousement le rang qui l’égalait à Dieu, non seulement il s’est anéanti en devenant semblable aux hommes, mais le temps est proche où il doit consentir, où il veut consentir à s’abaisser plus encore, « devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix ».

Le récit de la Passion que nous venons d’entendre, celui de saint Matthieu, nous donne de contempler Jésus qui consent à tout ce qui lui arrive. En tout, dans le détail de chaque instant de sa Passion, il reconnaît l’accomplissement des Écritures, non pas un scénario écrit d’avance et auquel il se conformerait comme un acteur à son rôle, mais la volonté bienfaisante du Père avec qui et pour qui et en qui il veut lui aussi, lui, ô combien, que chaque moment de cette Passion l’unisse à l’humanité entière, lui donne de rejoindre l’histoire spirituelle entière des humains, pour qu’elle débouche, enfin, pour qu’elle se transforme d’une histoire de refus en l’histoire d’une alliance. Il y consent, il y acquiesce, à chaque moment, à chaque instant, de toute la fibre de son humanité rejoignant l’obéissance éternelle du Fils bien-aimé., dans l’acquiescement total.

C’est pourquoi aux interrogations, il répond par le silence. Il ne se justifie pas, il n’explique pas. Il consent au plus intime de sa liberté de Fils, et il le fait pour nous, en notre faveur et en notre nom, jusqu’au « grand cri » ultime et à la remise de l’Esprit.

Frères et sœurs, son « temps est proche » aussi pour nous, en cette semaine qui s’ouvre. Le temps du Seigneur Jésus en nous et pour nous, en chacun de nous et pour chacun de nous. Vivons cette semaine pour lui et en lui. Tâchons, autant qu’il est possible, de nous débarrasser du souci de nous-mêmes pour nous attacher à lui, pour lui prêter attention en chaque étape de ce qu’il va vivre, en chaque geste qu’il va faire, en chaque détail de ce qu’il subit et qui retentit si fortement en lui. Et alors nous serons prêts pour la grande surprise de Pâques, et en nous et par nous, l’humanité entière y consentira davantage,

                                                                                                                                                     Amen.


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