Homélies du 24 mars 2024, pour le dimanche des Rameaux - L'Eglise Catholique à Reims et dans les Ardennes

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Publié le 26 mars 2024

Homélies du 24 mars 2024, pour le dimanche des Rameaux

Homélies pour le dimanche des Rameaux, année B, le 24 mars 2024, en la cathédrale Notre-Dame de Reims

Après l’évangile de l’entrée à Jérusalem

« Vous trouverez un petit âne attaché, sur lequel personne ne s’est encore assis ». Quelle allure pouvait bien avoir Jésus, monté sur un si petit ânon, un ânon tout jeune, non encore habitué à être monté ? C’est que Jésus n’entre pas dans Jérusalem comme un roi guerrier dans une ville conquise ; il n’a pas besoin d’un grand cheval expérimenté au combat ; il entre dans Jérusalem, la « ville de paix » comme celui qui y est chez lui, il y entre comme le roi pacifique, le roi de paix, qui vient au-devant des siens pour renforcer en eux ce qu’il apporte. Il aura à y affronter des ennemis, mais il vient avant tout à la rencontre d’un peuple préparé de longue date, de longue main, au-devant d’un peuple qui aspire à sa venue, plus et mieux qu’il ne le sait. Monté sur cet ânon, tout jeune, que personne n’a encore monté, il vient vers l’humanité entière en ce qu’elle a de plus jeune, en ce qui en elle aspire au meilleur et rêve au plus beau.

Frères et sœurs, nous vivons une époque d’inquiétudes et même d’angoisse. Peu d’entre nous oseraient dire et même penser que la génération suivante connaîtra un monde meilleur. L’humanité elle-même nous fournit bien des motifs pour nous inquiéter. Notre compréhension de l’être humain se transforme, nos moyens techniques pour nous remodeler augmentent. Savons-nous vraiment qui nous sommes et qui nous voulons être ? Mais, à ce moment où nous nous tenons, accueillons le Seigneur Jésus sans crainte. Par sa venue, il dévoile le fait que monte de nous tous et de chacun de nous un désir de vérité, un désir de réconciliation, un désir d’amitié et de fraternité qui sont notre fond le plus vrai.

Bien vite, le Seigneur sera confronté à nos médiocrités, nos peurs, nos colères, nous l’entendrons. Mais ne boudons pas notre joie : avec nos rameaux, acclamons-le, demandons-lui qu’il vienne davantage jusqu’à chacun ou chacune de nous, qu’il vienne davantage en chacune et chacun de nous, qu’il révèle en nous ce fond le meilleur qui demeure de l’enfant que nous fûmes et qui aspire à accomplir la promesse que nous sommes chacun et chacune pour les autres.

Avec les voix des collégiens de la Maîtrise, acclamons notre Seigneur et entrons à sa suite.

Après le récit de la Passion

« Des pauvres, vous en aurez toujours avec vous, et, quand vous le voulez, vous pouvez leur faire du bien ; mais moi, vous ne m’avez pas pour toujours. » Frères et sœurs, faisons-nous toujours aux pauvres, quels qu’ils soient, de quelque pauvreté qu’ils souffrent, tout le bien que nous voudrions ou que, parfois, nous réclamons pour eux de la part des autres ? Ne remettons-nous pas souvent à demain ce que nous pourrions faire au prix d’un petit effort : écouter, répondre, accueillir, sourire, partager, accorder un peu d’attention ? Ou encore décider, changer, renoncer, organiser ? Mais aujourd’hui, et pour une semaine, nous sommes appelés à nous intéresser à Jésus.

Le récit de la Passion selon saint Marc commence avec l’onction qu’une femme lui fait sur la tête, l’onction d’un parfum très précieux. C’est de Jésus lui-même, de son humanité sainte, de son corps même que nous sommes appelés à nous préoccuper, non pas de ses idées ou de son message, mais de lui-même, en sa singularité.

Être chrétiens, c’est avoir besoin de Jésus, besoin de ses gestes, besoin de sa présence. En sa Passion, nous l’avons entendu une fois encore, il nous est enlevé, mais c’est pour nous être donné davantage. Il est pris à ses disciples et ceux-ci ne se montrent guère capables de le suivre dans l’adversité, mais en fait, c’est lui qui s’abaisse, lui qui se dépouille, lui qui abandonne ce qui soutient sa dignité d’être humain ici-bas. Il se laisse dégrader, comme tant et tant d’hommes et de femmes ont été obligés de le faire dans l’histoire, tant et tant d’hommes et de femmes qui se sont vus ou se voient arracher même les maigres biens qui leur permettaient de soutenir leur existence au milieu des autres, pour se trouver comme niés, mais lui, sans le dire, sans le réclamer, mais du plus profond de son âme, il donne ce qu’il abandonne, il offre ce qu’on lui arrache, il « présente son dos à ceux qui le frappent et ses joues à ceux qui lui arrachent la barbe », et même, il consent à tout arrachement comme à l’occasion d’un don plus grand, il reçoit toute violence comme un appel à pardonner et à aimer davantage. Saint Paul nous a décrit cela dans son hymne aux Philippiens.            

Frères et sœurs, Jésus s’avance seul en sa Passion. Nul d’entre nous ne peut le suivre vraiment. Il est le Messie, celui qui a reçu l’onction, non pas seulement d’un parfum précieux, mais de l’Esprit Saint, dans lequel et par lequel, il obéit jusqu’au bout au Père. Il vient et il agit et il renonce à agir pour agir davantage encore en faveur de tous et chacune et chacun des humains. Il peut cependant trouver quelques aides, comme celle de Simon de Cyrène, « le père d’Alexandre et de Rufus », nous a rapporté l’évangéliste, qui est réquisitionné pour l’aider à porter sa croix. Une place nous est indiquée là. Si l’on a conservé les noms des fils de Simon, c’est sans doute qu’ils étaient connus des chrétiens, sans doute parce qu’ils étaient devenus disciples de Jésus, eux dont le père avait soutenu le Seigneur dans son effort immense. Déjà, en le regardant jusqu’au bout, comme les femmes mentionnées par saint Marc et les autres évangélistes, nous l’accompagnons. Mais nous pouvons le faire de bien des manières, au fil des jours. Dans notre monde fatigué et tourmenté, gardons au cœur la Passion du Seigneur. Laissons-la en ces jours s’inscrire mieux encore en notre âme, en notre esprit, au lieu profond où se forment nos pensées et se décident nos actions. Puissions-nous trouver, au fil des jours, comment soutenir le Seigneur en sa Passion, par nos gestes très simples, par nos décisions quotidiennes et, parfois, en certains choix décisifs. Lui, dans son abaissement, vient nous rejoindre au plus intime de nous-mêmes, au plus douloureux, au plus ténébreux de nous-mêmes. Ce que la foi réclame de nous, ne l’oublions jamais, ne vient pas de la contrainte, mais monte de l’amour suscité par tant d’amour.

Le récit de saint Marc garde une énigme pour notre espérance : « Or, un jeune homme suivait Jésus ; il n’avait pour tout vêtement qu’un drap. On essaya de l’arrêter. Mais lui, lâchant le drap, s’enfuit tout nu. » Pourquoi ce détail ? Serait-ce la signature de celui qui deviendra plus tard un compagnon de Paul et de Pierre et un évangéliste ? Serait-ce l’annonce, discrète, que les forces de la colère, de la peur, de la jalousie, les forces des puissants de ce monde et celles du réalisme qui si souvent dicte nos comportements les plus froids et les plus détestables, ne parviennent pas à tout capter, à tout saisir, à tout prendre dans leurs mains ? Un jeune homme échappe, promesse d’une humanité renouvelée, promesse d’une jeunesse en nous qui n’est pas absorbée dans le triomphe des forces du mal. « Vraiment, déclara le centurion, cet homme était Fils de Dieu ! ».                                                                                                                                                            


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