Homélie pour le 5ème dimanche de Pâques, - L'Eglise Catholique à Reims et dans les Ardennes

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Homélie pour le 5ème dimanche de Pâques,

année C,

le samedi 14 mai 2022, en l’église de l’ermitage de Saint-Walfroy, premier pèlerinage intérieur diocésain

La Terre Sainte, c’est bien là bas, en Israël et en Palestine, peut-être aussi au Liban et en Syrie ou en Jordanie a, pour nous au fond de la Méditerranée, là où Jésus est né, a vécu, a marché, a parlé, a dormi, est mort et est ressuscité. La Terre Sainte a été l’aboutissement de la longue marche du peuple d’Israël à travers le désert après qu’il a été arraché à l’esclavage et à la mort en Égypte. Mais la Terre Sainte est ici aussi, là où nous sommes, du moment que nous voulons bien nous rencontrer au nom du Seigneur, pour lui, en le cherchant, Lui. Nous nous sommes levés tôt ce matin, et je vous en remercie et nous pouvons nous en remercier les uns les autres. Car nous avons consenti cet effort pour le Seigneur et, en Lui, les uns pour les autres. Nous n’avions, chacune et chacun, aucun autre intérêt à cet effort que l’espérance de marcher ensemble un moment sur les chemins du Seigneur. En quelques heures, assez brèves finalement, nous avons revécu les quarante ans du peuple hébreu à travers le désert, soutenu par les quatre dons de Dieu : l’eau, le feu, la manne et la loi. Nous sommes arrivés au terme de notre marche, ici, au somment de cette colline, dans cette région tout entière couverte de forêts du temps de saint Walfroy et donc considérée alors comme un désert, un lieu où l’être humain ne devrait pas habiter. Nous sommes maintenant réunis, comme jadis les Hébreux autour de la tente de la rencontre ou les Juifs autour du Temple de Jérusalem, et nous sommes accueillis par le Seigneur Jésus pour le repas et nous recevons de lui, en guise de nourriture, cette parole : « Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres », à quoi il ajoute, et cela change beaucoup : « Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. » Voilà qui méritait quarante ans de marche dans le désert, voilà qui méritait bien notre lever matinal et une matinée de marche : entendre Jésus nous dire cela à nous, comme l’expression totale de l’attente de Dieu à notre égard, comme l’accomplissement de toutes les démarches humaines, comme la rencontre la plus forte que nous puissions vivre avec lui : « Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. »

Frères et sœurs, nous le savons bien, nous l’entendons dire et répéter, et peut-être à la messe plus encore qu’à la télévision : nous vivons des temps de grands changements, de changements bouleversants, dans notre organisation économique, dans nos constructions politiques, dans nos conceptions de ce qu’est être un humain, et aussi dans notre vie ecclésiale. Pourtant, l’essentiel, la seule réalité qui compte vraiment est celle-là : « Aimez-vous les uns les autres. » Aurons-nous du pétrole ? Comment cultiverons-nous nos terres ? Comment nous déplacerons-nous ? et encore où trouverons-nous la messe ? Mais, quoi qu’il en soit, ceci demeure : le commandement nouveau « c’est de vous aimer les uns les autres » et non pas aimer parce qu’on a de la sympathie, non pas aimer parce qu’être ensemble nous rend la vie plus facile, un peu plus légère. Non : « Comme je vous ai aimés ». Aimer, comme lui, Jésus, nous a aimés, comme en Jésus, Dieu nous a aimés et nous aime, c’est se laisser affecter par l’autre, c’est prendre sur soi et pour soi ce que l’autre vit au plus intime de lui-même, c’est croire que ce que l’autre vit compte autant pour moi que ce qui m’arrive à l’intime de ma chair.

Au terme de notre marche, dans la tente de la rencontre que cette chapelle symbolise, nous retrouvons le Seigneur et ce qu’il nous dit et ce qu’il nous donne. Nous tressaillons de joie parce que nous l’entendons nous dire : « Je vous donne un commandement nouveau ». Il ne nous donne pas la solution de nos problèmes, il ne nous rassure pas sur les défis qui nous attendent, il en ajoute un autre plutôt, toujours neuf, toujours nouveau : « Aimez-vous les uns les autres ». Nous nous demandons souvent ce qu’est être chrétien, nous nous interrogeons sur ce qui nous distingue des autres, et les autres, cela veut dire ceux et celles d’une autre religion ou qui sont sans religion. La réponse est à portée de notre main ou de notre cœur : « A ceci, tous reconnaitront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » nous le comprenons ensemble, frères et sœurs : si notre projet diocésain nous appelle à vivre en fraternités de proximité qui se réunissent toutes les semaines ou tous les quinze jours, c’est qu’il s’agit que, plus que jamais, mieux que jamais, nous vivions cet amour auquel le Seigneur nous appelle. Certes, l’amour que l’on a pour son mari ou son épouse, pour ses enfants, pour ses parents, ses amis, mais non moins et plus encore l’amour échangé entre ceux que le Seigneur lui-même nous donne parce qu’ils sont pour lui des disciples et peuvent le devenir davantage, tout comme nous. La Terre Sainte est toute proche de nous, chaque fois que et dans la mesure où nous apprenons à nous aimer les uns les autres à cause du Seigneur, en Lui et pour lui. Chaque fois, la demeure de Dieu descend du ciel, « prête pour les noces, comme une épouse parée pour son mari ». Chaque fois, la voix forte du Fils bien-aimé désigne tel groupe, telle personne : « Voici la demeure de Dieu avec les hommes ; il demeurera avec eux, et ils seront ses peuples, et lui-même, Dieu avec eux, sera leur Dieu. » Jésus évoquait ce mystère en se disant glorifié et en annonçant que le Père était glorifié en lui. Car lorsque nous nous aimons les uns les autres au nom de Jésus et en lui, nous le glorifions comme notre Seigneur et nous glorifions Dieu en le faisant reconnaître comme Père et nous sommes glorifiés en étant reconnus frères et sœurs de Jésus, fils et filles du Dieu Très-Haut. Frères et sœurs, en nous levant tôt ce matin et en marchant ensemble en ce jour, nous avons avancé sur le chemin de l’amour mutuel. Il nous faut le poursuivre, il nous faut le rendre plus concret. Le processus synodal nous y encourage, nous y appelle même, mais plus que tout, c’est le commandement toujours nouveau du Seigneur.

Dans les Actes des Apôtres, permettez-moi de retenir un fait. Paul et Barnabé achèvent un premier voyage. Ils ont déjà pris sur eux d’ouvrir les richesses de Jésus aux païens sans en faire d’abord des Juifs, en les accueillant comme Dieu les avait préparés. Sur le chemin du retour, ils mesurent la fragilité de ces communautés à peine nées : « Ils affermissaient le courage des disciples ; ils les exhortaient à persévérer dans la foi, en disant : ‘’il nous faut passer par bien des épreuves pour entrer dans le royaume de Dieu’’. » Nous pouvons comprendre ces épreuves de bien des manières, nous en connaissons nous aussi, et certaines peuvent être grandes. Mais surtout, soyons clairs : décider d’aimer, décider que l’amour, l’amour qui consiste à se laisser affecter par autrui, sera mon chemin de vie, c’est s’exposer à des douleurs, des tribulations, des déceptions. Cela n’a de sens qu’à cause du Seigneur Jésus, parce qu’il est là, Lui, dans la Tente de la rencontre et en chacun de nous, et qu’il nous dit : « Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. » Voilà ce qui nous caractérise, nous chrétiens : nous nous aimons, nous cherchons à nous aimer, comme Jésus nous a aimés, comme Jésus m’a aimé, comme il vous a aimé, vous, frère, comme il vous a aimée, vous, sœur. Or, que font Paul et Barnabé pour soutenir et affermir les minuscules communautés de Lystres, d’Iconium, d’Antioche de Pisidie : « Ils désignèrent des Anciens… et, après avoir prié et jeûné, ils confièrent au Seigneur ces hommes qui avaient mis leur foi en lui. » Ces hommes mis à part peuvent être compris de bien des manières. Ils nous indiquent en tout cas pourquoi il nous faut des prêtres et d’autres ministres : pour nous souvenir toujours que nous sommes donnés les uns aux autres par le Seigneur, pour vérifier toujours que c’est vraiment pour lui et en lui et avec lui que nous allons les uns vers les autres, pour un amour qui nous précède et nous dépasse, mais qui nous englobe aussi et qui nous envoie les uns vers les autres.

Frères et sœurs, puissent nos villages, nos quartiers, nos immeubles, devenir des Terres Saintes proches de chacune et de chacun, grâce à une fraternité de proximité d’une forme ou d’une autre, où l’on apprend à s’aimer comme le Seigneur nous a aimés, pour la gloire de Dieu qui est aussi sa joie, et pour notre gloire à tous, qui est notre vie,                                                

Amen.


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