Homélie pour le 3ème dimanche de Pâques - L'Eglise Catholique à Reims et dans les Ardennes

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Publié le 19 avril 2021

Homélie pour le 3ème dimanche de Pâques

Homélie pour le 3ème dimanche de Pâques, année B, le 17 avril 2021, aux Campanules (Auvillers les Forges).

Frères et sœurs, saint Luc, par son récit, essaie de nous convaincre d’une idée simple et forte : la Résurrection, c’est du concret. Jésus est vivant, vraiment vivant, vivant comme un être humain est vivant, capable de se montrer dans son corps, capable de montrer ses mains et ses pieds, de les donner à toucher, capable de manger ce qu’on lui offre. Il n’a pas fait semblant de mourir, il ne fait pas semblant d’être vivant, il n’est pas vivant seulement en idée ou en esprit. Il vaut la peine de prendre le temps de visualiser les différents moments que l’évangéliste nous rapporte et de nous représenter les émotions des apôtres et de leurs compagnons : la frayeur et la crainte, puis la joie et l’étonnement, que Jésus semble surmonter en demandant quelque chose à manger. Il faut l’entendre leur dire : « Voyez mes mains et mes pieds, c’est bien moi, touchez-moi, regardez ». Lorsque l’on retrouve quelqu’un, c’est humain, on a envie de le prendre dans ses bras, de lui saisir la main. Nous pouvons nous représenter la stupeur et le respect des apôtres et des quelques autres participants de ce jour-là, leur désir de s’approcher de celui qui soudain « fut présent au milieu d’eux » et leur crainte, leur retenue, leur émotion. Voyons-les tendre la main et ne pas oser aller jusqu’au bout de leur geste. Comment se comporter avec un mort revenu à la vie, plus même, infiniment plus, avec un mort qui a vaincu la mort ?

Car nous le sentons et nous l’entendons : il est vivant d’une manière nouvelle. Car il ne vit plus comme un individu humain comme les autres, parmi les autres. Il vit comme celui qui donne sens à tout ce qui a été annoncé par les prophètes d’Israël : « Il faut que s’accomplisse tout ce qui a été écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, les Prophète et les Psaumes. » Il est impressionnant de constater qu’il n’impose pas un sens : « il ouvrit leur intelligence à la compréhension des Écritures. » La résurrection de Jésus n’est pas un coup de force, l’enlèvement d’un cadavre, l’escamotage d’un mort ; elle est au contraire ce qui permet de comprendre l’alliance de Dieu avec les hommes, la longue histoire d’Israël, avec sa sainteté et ses infidélités, mais à condition que nous fassions l’effort de chercher, que nous essayons d’entrer dans l’intelligence possible. Mieux même : « Il est écrit que le Christ souffrirait, qu’il ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, et que la conversion serait proclamée en son nom, pour le pardon des péchés, à toutes les nations. » Ce qui est donné à comprendre, mais qui demande un travail, une recherche, un effort toujours à reprendre, c’est la vie elle-même, le mélange de joies et de souffrances qui la caractérise, qui en font le goût et le sel, le poids et l’attrait ; c’est, plus profondément encore, que le passage de tous vers la vie ne peut que passer par la souffrance du Messie, son rejet par les hommes, afin que de ce rejet même puisse venir le pardon pour tout ce qui, de la part des humains, abîme le sens et la beauté et la bonté de la vie.

Le Ressuscité ne demande à ses Apôtres et à leurs compagnons qu’une chose : « A vous d’en être les témoins. » A vous d’être les témoins que le Messie a été crucifié et a vaincu la mort et d’être les témoins encore qu’il vaut la peine de sortir de son péché, toujours, à tout moment, que ce soit beaucoup ou un peu. Cet appel du Ressuscité, saint Jean dans sa première lettre le traduit en termes simples : garder les commandements. Le vrai témoin est celui qui garde les commandements de Jésus. Voilà qui est concret aussi. Garder le double commandement de Jésus : aimer Dieu et aimer son prochain, passe par des gestes très concrets. Ne pas tuer, ne pas voler, ne pas mentir, cela appelle des gestes très concrets, ce que l’on ne fait pas et ce que l’on fait à cause de ces commandements. Mais comprenons-le bien : « garder les commandements » ne signifie pas que nous les respections en tout à tout moment. Garder les commandements, c’est les aimer, accepter d’être jugés par eux, accepter que ces commandements habitent notre mémoire, ce que l’on peut appeler notre conscience, et nous appellent à vivre mieux, ne nous permettent pas d’être contents de nous-mêmes. Être témoins de Jésus ne veut pas dire que nous allons vivre parfaitement, comme Jésus. Mais c’est accepter de ne jamais renoncer à essayer d’aimer et d’aimer mieux, pas à pas, morceau par morceau, et Dieu et notre prochain. C’est accepter d’avoir à reconnaître que nous y manquons et que nous avons besoin de pardon et d’une force qui vienne d’un autre que nous, de Jésus lui-même, pour que nos gestes et nos paroles, souvent maladroits, parfois dus à tout autre chose que l’amour de Dieu et du prochain, soient travaillés par Jésus, celui qui est mort à cause de nos péchés et qui est ressuscité pour notre vie. Être témoins de Jésus, c’est ne jamais renoncer à essayer d’aimer, alors même que nous savons nos impatiences, nos contradictions, nos égoïsmes ; c’est ne pas nous résigner à nos cœurs sclérosés et espérer toujours que lui pourra mettre en nous son Esprit d’amour et de vérité. Au soir de la Résurrection, Jésus, selon saint Luc, demande à ses Apôtres « quelque chose à manger » et on lui donne « une part de poisson grillé ». Tout geste de notre part qui va dans le sens de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain, désormais, est comme cette part-là de poisson grillé. Le Ressuscité n’en a pas besoin mais il est heureux de la recevoir de notre main. C’est le peu que nous pouvons lui offrir, qui n’est rien en proportion de sa mort, de notre trahison, de nos péchés, mais lui le reçoit et l’unit à son acte à lui par lequel il justifie toute l’histoire des humains.

En première lecture, nous avons entendu saint Pierre parler à la foule des Juifs au matin de la Pentecôte. Il n’hésite pas à leur dire qu’ils ont voulu la mort de Jésus : « Vous l’aviez livré, vous l’aviez renié en présence de Pilate… Vous avez renié le Saint et le Juste… Vous avez tué le Prince de la vie », mais comprenons-le bien : c’est à nous qu’il parle, et à lui aussi d’ailleurs. Oui, Jésus meurt parce que nous sommes des pécheurs ; Jésus meurt parce que les humains ne cessent pas de laisser obnubiler par la peur de manquer et la volonté de saisir, ne cessent pas de manquer de confiance en Dieu et en ses dons. Mais ce qui compte n’est plus cela. « Dieu a accompli ce qu’il avait d’avance annoncé par la bouche de tous les prophètes : que le Christ, son Messie, souffrirait ». Maintenant, aujourd’hui comme chaque jour, parce que le Seigneur Jésus vient là, au milieu de nous, nous pouvons nous convertir et il vaut la peine de le faire, nous pouvons aimer les commandements de Jésus même si nous avons du mal à les respecter, nous pouvons nous reconnaître pécheurs parce que nous ne serons pas exclus mais nous serons pardonnés, c’est-à-dire intégrés en lui qui se rend présent au milieu de nous et pour nous,

                                                                              Amen.


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