Homélie pour le 3ème dimanche de Carême - L'Eglise Catholique à Reims et dans les Ardennes

Tous les articles

Publié le 7 mars 2021

Homélie pour le 3ème dimanche de Carême

Homélie pour le 3ème dimanche de Carême, lectures de l’année A, le 7 mars 2021, en la collégiale Notre-Dame de Carignan, célébration du premier scrutin pour Franck Toullec.

La célébration du scrutin fait, selon la Tradition liturgique, les lectures proclamées ont été celles de l’année A, notamment l’évangile de la Samaritaine (Jn 4, 5-42)

Frères et sœurs, nous voici donc une fois de plus témoins de la rencontre de Jésus et de la femme de Samarie. Nous nous inscrivons dans la longue tradition de l’Église puisque, dès que la liturgie s’est organisée, l’évangile de cette rencontre a été proclamé pendant le Carême pour accompagner le premier scrutin célébré pour les catéchumènes. Scrutin : le mot évoque le regard de Dieu qui se pose sur un homme ou sur une femme pour scruter son cœur, son mystère profond, et le choisir ou la choisir pour avoir part avec le Fils unique. Le cœur profond de la femme de Samarie a été mis dans la lumière de Dieu, le cœur du Christ Jésus a été dévoilé. En méditant ce récit, exposons notre cœur profond, le lieu où se décident nos actes et où se nouent nos pensées, au regard purifiant et vivifiant de Dieu et accompagnons notre frère Franck qui aspire à être reçu dans le Christ.

Reprenons ce récit selon trois points de vue.

  1. Une rencontre auprès d’un puits. Le puits signifie les nécessités de la vie terrestre : la femme y vient puiser l’eau nécessaire pour la vie quotidienne de sa maison ; elle y vient chaque jour au moins ; elle y est venue hier et y reviendra demain. C’est une tâche répétitive, fatigante, et en même temps, il est réjouissant d’avoir de l’eau et il serait inquiétant d’en manquer, les Hébreux dans le désert en avaient fait l’expérience. Mais, ce jour-là, le puits prend une autre signification : cette femme n’est pas faite seulement pour survivre en répétant chaque jour les gestes de la nourriture et du ménage ; il y a en elle une profondeur ; elle est, comme tout être humain, comme chacun de nous, une profondeur qui aspire à être branchée sur une source jaillissante. En d’autres termes, la vie humaine n’est pas que survie, chaque être humain vient de l’amour jaillissant de Dieu et peut faire passer cet amour jaillissant, cette bonté, cette vie vivifiante, en ses actes et en habiter ses pensées. Notre frère Franck, dans la nuit de Pâques, à quelque heure que nous la célébrions, sera plongé dans la plénitude de l’amour de Dieu ouvert pour nous et il ressortira pour le répandre avec nous dans ses actes et ses pensées.
  2. La femme de Samarie. Vous le savez et nous l’avons entendu : les Samaritains étaient méprisés par les Juifs ; ils descendaient de colons installés là par les Assyriens à la place des Juifs déportés et ces colons avaient mélangé leurs traditions religieuses avec ce qu’ils avaient trouvé des anciens Juifs. De plus, cette femme a un statut particulier. Qu’elle vienne chercher de l’eau à midi, à l’heure la plus chaude, est un indice : elle ne souhaite pas, elle ne peut pas aller puiser l’eau en même temps que les autres femmes. Jésus lui parle, Jésus lui demande quelque chose. Il a quelque chose à recevoir, même d’une Samaritaine, même d’une Samaritaine que les autres Samaritains méprisent ou tiennent à l’écart. Elle vient pour chercher de l’eau, un point, c’est tout, banalement, mais, sans que rien le laisse prévoir ce jour-là, sa vie bascule à cause des paroles étonnantes de l’inconnu qu’elle trouve, fatigué, assis près du puits de Jacob. Alors qu’elle pouvait penser n’avoir d’autre destin que survivre en se méfiant même de ceux qui l’entourent, elle reçoit la proposition de recevoir une eau vive, jaillie du cœur même de Dieu, et de faire de sa vie, de ses actions quotidiennes, une eau vive pour ceux et celles qu’elle rencontrera. Alors qu’elle ne parvient guère à garder les commandements de Dieu, elle reçoit l’assurance que l’Esprit-Saint de Dieu peut lui être donné, qu’il ne dédaigne pas de venir dans ce qu’elle a de mélangé, de compliqué, de fragile, que l’eau jaillissante de Dieu peut se frayer un chemin en son cœur et porter quelque chose de la bonté de Dieu en ce monde. Il y suffit qu’elle dise une parole de vérité sur elle-même : « Je n’ai pas de mari ». C’est un bout de la vérité, c’est une vérité pour Jésus. Notre frère Franck, comme tous les catéchumènes adultes, a découvert que Dieu n’avait de mépris pour aucun être humain et que, même nos faiblesses, même nos fautes, même la conscience où nous pouvons être de notre incapacité de vivre toujours dans l’amour de Dieu et de l’amour de Dieu, ne pouvaient dégoûter Dieu de nous relier à sa source vivifiante et de nous confier sa bonté à mettre en œuvre.
  3. Jésus. Jésus rencontre la femme de Samarie. C’est le hasard de l’heure, mais pour lui, il n’y a pas de hasard, une occasion lui est donnée d’ouvrir à cette femme la dimension pleine de son existence humaine. A travers elle, il rencontre de même les habitants de Sykar et, d’une certaine façon, il rencontre à nouveau ses disciples. Il ne se contente pas d’exposer à la femme une théorie, des idées sur la vie humaine, de lui partager une sagesse spirituelle. Bien d’autres hommes ou femmes l’ont fait au cours des âges, parfois avec des intuitions admirables. Jésus creuse le cœur de cette femme, l’aider à regarder la vie autrement, plus profondément, plus spirituellement, dans une vérité plus large que la seule satisfaction des besoins primaires, mais il fait bien plus : dans l’évangile selon saint Jean, le sang et l’eau jaillissent sur la croix de son cœur transpercé, comme jadis dans le désert du rocher frappé par Moïse. Lui, Jésus, prend sur lui le péché de cette femme, ce qui l’empêche d’être elle-même, ce qui la ramène toujours au plus médiocre d’elle-même, et lui, Jésus, l’intègre dans sa relation au Père. Il est, lui, l’adorateur en esprit et vérité, le vrai adorateur, et il nous permet, à nous pécheurs, à nous qui ne vivons jamais toujours en esprit et vérité, parce que nous sommes déchirés par nos besoins matériels et par nos désirs contradictoires et par nos peurs de manquer, d’oser tout de même nous tenir devant le Père et d’agir devant lui, en Jésus. Ce qui compte dans la vie chrétienne, permettez-moi de le dire sans précaution, ce n’est pas le nombre de fois où nous allons à la Messe, mais notre consentement à nous laisser intégrer en Jésus, à mettre nos pensées et nos actes dans sa lumière, dans l’eau et aussi le feu de son Esprit. Notre frère Franck nous rappelle par sa marche vers le baptême que notre vie n’est pas faite que d’idées et de valeurs, mais de confiance en Jésus, d’abandon à Jésus, d’obéissance à Jésus et par lui, au Père.

Frères et sœurs, comme Dieu a abreuvé le peuple dans le désert, Jésus relie nos vies à la source jaillissante de l’amour qu’est Dieu et nous confie de faire passer l’amour de Dieu en nos actes et nos pensées. Nous osons croire cela parce que nous pouvons contempler Jésus, Messie crucifié pour nous, Messie ressuscité, qui acquiert par sa mort la puissance d’implanter en nous son Esprit. Jésus a soif, non de l’eau de nos puits mais de ce qui monte de nos cœurs, si nous nous laissons habiter par le don de l’Esprit-Saint.

Que notre intercession accompagne notre frère Franck qui vient se placer sous le regard de Jésus et qu’elle accompagne les jeunes de sixième qui recevront dans deux semaines la croix comme la promesse d’une vie humaine vivifiée par le don de Dieu,

                                                                                                       Amen


Partager

Notre site utilise des cookies pour vous offrir une expérience utilisateur de qualité et mesurer l'audience. En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies dans les conditions prévues par nos mentions légales.