Homélie pour la solennité de saint Remi, le dimanche 2 octobre 2022, en la basilique Saint-Remi - L'Eglise Catholique à Reims et dans les Ardennes

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Publié le 4 octobre 2022

Homélie pour la solennité de saint Remi, le dimanche 2 octobre 2022, en la basilique Saint-Remi

Homélie pour la solennité de saint Remi, le dimanche 2 octobre 2022, en la basilique Saint-Remi.

« L’écoute, chemin vers Dieu » était le thème de la neuvaine cette année. « J’écoute », dit le psalmiste, et il poursuit : « Que dira le Seigneur Dieu ? » (Ps. 84). Cet après-midi, nous l’entendons : « Que votre cœur ne soit pas bouleversé ». Nous entendons souvent ce passage pendant les funérailles, mais ce n’est pas forcément pour cela que Jésus a prononcé ces paroles. Ses disciples ont quelques raisons d’être bouleversés, puisque, lui, Jésus, va les quitter, il va les laisser seuls. Comment continuer de vivre sans lui à la hauteur où Jésus les a portés ? Comment maintenir l’attention à la venue toute proche du Royaume, sans Jésus dont la présence rapproche toutes les promesses. Notre cœur, votre cœur, frères et sœurs, pourrait être bouleversé en ces temps étonnants que nous vivons. Comment vivre de la charité dans un monde où chacun réclame ses droits et tâche de les maximiser et comment, sans renoncer à ses droits, accueillir toute chose comme un don ? Comment vivre dans l’espérance dans un monde où nous avons tant et où nous risquons de perdre beaucoup et comment partager ce que nous ne prenons pas totalement en main ? Comment vivre dans la foi dans un monde où toute vérité est mise en cause, où la vérité n’est acceptée que si elle est mouvante, si elle s’adapte aux désirs des uns ou des autres, où la seule vérité audible est souvent celle de l’épanouissement de soi ? Écoutons donc sérieusement le Seigneur Jésus qui nous appelle ainsi : « Que votre cœur ne soit pas bouleversé. » Il nous en assure : « Celui qui croit en moi accomplira les mêmes œuvres que moi. Il en accomplira même de plus grandes, puisque je pars vers le Père. » Recevons cette parole comme une parole d’encouragement, comme une parole qui nous fortifie. Le Seigneur ne met pas ses disciples devant une tâche impossible. S’il part vers le Père, ce n’est pas pour nous laisser seuls poursuivre un idéal insensé dans un monde qui ne serait pas fait pour l’amour de charité. S’il part vers le Père, c’est pour nous envoyer son Esprit-Saint, c’est pour nous entraîner avec lui, vers lui, c’est pour intercéder pour nous en tous temps, sans relâche, afin que nos vies à chacun, nos « vies minuscules », comme les a nommées un auteur, portent elles aussi l’humanité entière et la tirent vers le haut et vers l’éternel, vers ce qui pourra durer pour toujours. S’il part vers le Père, c’est parce qu’il nous rend capables de vivre de l’amour de Dieu et du prochain là où il pourrait ne pas y en avoir. Et chaque acte de charité est une victoire de Dieu le Créateur sur tous les refus et toutes les résistances.

Dans ce moment de dialogue entre Jésus et ses disciples, juste à quelques heures de son arrestation et de sa Passion, juste « à l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père », le contraste est impressionnant entre Jésus et les siens. Eux sont bouleversés, inquiets, ils ne savent où il va ni comment y aller ; lui ne cesse de les rassurer, de leur dire qu’ils connaissent le chemin et que le chemin les mène à la vérité et à la vie, qu’ils accomplissent et accompliront les œuvres du Père, que le lien entre lui et eux est si fort, si vivant que rien ne peut le défaire, ce lien que sa Passion et sa mort rendront pleinement vivant dans la Résurrection. Frères et sœurs, dans un monde inquiet, en changement, dans une humanité qui prend conscience des limites de la planète et qui se demande comment elle y vivra dans dix ans ; dans une humanité qui peut tant agir sur elle-même qu’elle est tentée de remettre en cause la distinction entre l’homme et la femme ; dans une humanité qui ne veut imaginer la vie qu’autonome et confortable au point qu’elle se demande si elle ne pourrait pas ou ne devrait pas aider quelques-uns de ses membres à mourir avant l’heure de la mort ; dans une humanité qui n’est pas très fière du monde qu’elle prépare aux générations futures et qui, en certaines de ses parties, préfère ne pas enfanter ; dans une humanité où les religions se rencontrent, où le catholicisme paraît remis en cause partout ou presque, où d’autres religions progressent ou cherchent à progresser, où certains groupes veulent être mus par la violence qu’ils prétendent exercer au nom de Dieu et diffusent une interprétation de leur religion qui nourrit leur violence, même sous la forme du terrorisme ; dans notre Europe qui s’est bâtie sur le refus de la guerre comme moyen de politique et qui retrouve à ses portes une guerre de conquête et de prédation, nous, chrétiens ; nous, catholiques, ajoutons souvent nos inquiétudes à celles de tous.

Il y a un an, au terme de cette célébration, je vous avertissais du choc qu’allait être la publication du rapport de la CIASE. Il y a deux ans, nous vivions cette Saint-Remi entre deux confinements et limitation des rassemblements, même cultuels. Il y a trois ans, nous nous préparions au grand changement de notre organisation pastorale diocésaine. Nous avons, vous avez, bien des raisons d’avoir le cœur bouleversé, bien des raisons de dire au Seigneur : « Nous ne savons même pas où tu vas ; comment pourrions-nous savoir le chemin ? » Nous recevons, ce soir, ensemble, sa réponse : « Moi, je suis le chemin, la vérité et la vie ; personne ne va vers le Père sans passer par moi. »  Il sait que nous avons besoin de lui, il ne nous abandonne pas. Même si nous avons moins de prêtres, même s’il est difficile, voire impossible à beaucoup d’entre vous d’aller à la messe chaque dimanche, les moyens de sanctifier le jour du Seigneur ne manquent pas et nous appartenons tous à une Église qui célèbre l’Eucharistie et les gestes du Christ par les sacrements. Même si la transmission de la foi de génération en génération n’a rien d’automatique, des hommes et des femmes choisissent de venir au Christ à toutes sortes de moments de leur vie. Même s’il est difficile de trouver des personnes bénévoles pour prendre la responsabilité d’œuvres ou de mouvements, des actions naissent, au nom du Seigneur, là où on ne les attendait pas. Nous vivons un temps de transformation, un temps de transition. Écoutons ce que le Seigneur nous dit et soyons persévérants.

Écoutons aussi ce que nous dit l’Apôtre Paul. Le plus essentiel pour lui s’exprime ainsi : « Que le Seigneur vous donne, entre vous et à l’égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant, comme celui que nous avons pour vous. » Comment nos paroisses, nos Espaces Missionnaires, nos mouvements, traduisent-ils l’amour débordant et intense que nous avons pour tous les humains, en prolongement de l’amour que Dieu, le Créateur, a pour chacune et chacun. Comment nos rencontres en conseils d’animation missionnaire ou en conseils locaux d’animation ou en équipes pastorales sont-elles nourries par l’amour de plus en plus intense et débordant qu’il nous est donné d’avoir pour tous. Pour l’Apôtre, là est l’essentiel. « Pour le reste », écrit-il, « vous avez appris de nous comment il faut nous conduire pour plaire à Dieu, et c’est ainsi que vous vous conduisez déjà » et il ajoute : « Faites donc de nouveaux progrès, nous vous en prions, nous vous le demandons. » Déjà, frères et sœurs, vous vivez, nous vivons en fils et filles de Dieu, et c’est parce que nous en vivons déjà que nous pouvons espérer vivre ainsi de mieux en mieux. La vie chrétienne n’est pas la course épuisante vers une perfection que nous n’atteindrons jamais, mais l’approfondissement et le déploiement de la relation inattendue que le Seigneur Jésus, Messie d’Israël, a ouverte ente le Père et nous, nous emplissons de son Esprit-Saint pour que nous puissions marcher sur ce chemin, y découvrir notre vérité à chacune et à chacun et devenir des vivants, porteurs de vie pour les autres, au service de la vie des autres.

Alors, frères et sœurs, nous participons et c’est bien normal aux inquiétudes du monde comme à ses projets et à ses joies. Mais nous ne devrions pas être de ceux et de celles qui y ajoutent de l’angoisse, de l’amertume, de la colère. Nous devrions être, au milieu de nos frères et de nos sœurs en humanité, de celles et de ceux qui apportent de l’amour et de l’espérance. De l’amour parce que chacun compte aux yeux de Dieu et que nous tâchons de vivre de telle manière que chacun, que chacune, compte à nos yeux, que la destinée de chacune et de chacun nous atteigne intérieurement. De l’espérance, parce que nous savons que la vie terrestre n’aboutit ni à une impasse ni au néant. Elle aboutit à la vérité sur chacune et sur chacun et sur la vie, lorsque nous serons tous rassemblés et que chacun servira la croissance de l’autre.

Hier, lors du rassemblement des membres des conseils locaux d’animation, des conseils d’animation missionnaire, des conseils pour les affaires économiques paroissiaux ou diocésain, des équipes pastorales et de quelques autres, nous ont été rapportés ces mots d’une personne en précarité : « Lorsque nous sommes ensemble, c’est la vie éternelle ». Le Seigneur Jésus ne cesse pas de nous prendre pour nous donner les uns aux autres comme des frères et des sœurs à aimer. Qu’ils sont beaux, sur les montagnes, les pas du messager » de cette bonne nouvelle là. Sachons l’écouter et vivre de sa parole avec courage et confiance,  

Amen.

Découvrir l’album photo de la Neuvaine de la Saint Remi 2022


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