Homélie pour la confirmation des lycéens du lycée Saint-Joseph de Reims - L'Eglise Catholique à Reims et dans les Ardennes

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Publié le 29 novembre 2021

Homélie pour la confirmation des lycéens du lycée Saint-Joseph de Reims

Homélie de Mgr Eric de Moulins-Beaufort, le samedi 27 novembre en la basilique Saint Remi.

« J’ai demandé une chose au Seigneur, la seule que je cherche : habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie » : cette affirmation du psalmiste peut-elle être la vôtre, jeunes gens qui vous présentez en ce jour pour que le sacrement de la confirmation soit célébré en votre faveur ? Est-ce que, vraiment, la seule chose que vous cherchiez est d’habiter la maison du Seigneur, tous les jours de votre vie ? Est-ce notre désir, l’élan brûlant de notre cœur, frères et sœurs, à nous tous qui entourons nos amis qui se présente ce matin devant l’autel du Seigneur ? Peut-être me répondrez-vous qu’il serait normal que ce soit le mien, mais que vous avez par devoir et aussi par choix d’état de vie d’autres désirs, d’autres attentes, d’autres lieux où réussir et trouver de quoi vivre ? que veut dire donc : « habiter la maison du Seigneur », et « l’habiter tous les jours de sa vie » ?

Vous êtes à l’âge où votre personnalité se forme et où, tout à la fois, vous en prenez possession. Vous apprenez à l’habiter et, en même temps, vous la façonnez ou la polissez en quelque sorte vous-mêmes. Dans le même mouvement, vous apprenez à habiter ce monde, non plus limité à votre cercle familial et amical, mais ce monde dilaté à l’ensemble de l’humanité au cœur de laquelle vous souhaitez avoir un impact concret par votre action, dilaté encore à la totalité de l’univers que vous apprenez à connaître et qui doit devenir le théâtre de votre épanouissement personnel comme le champ d’expansion de l’humanité entière. Or, justement : la « maison du Seigneur », la maison du Dieu vivant, celle que toute l’histoire de l’alliance avec Israël prépare et annonce, c’est nous-mêmes, chacune et chacun de nous et c’est nous tous ensemble pour que tout l’univers puisse être en vérité une « maison du Seigneur », bonne à habiter, pour lui et pour nous, le lieu et le signe de notre rencontre. La bonne nouvelle que nous apporte la foi en Jésus est que  l’univers entier n’est pas que le résultat de phénomènes physico-chimiques mais le don de Dieu qui a créé ce vaste espace pour qu’il rende possible la rencontre de tous avec chacun et de chacun avec lui, et notre hospitalité réciproque ; elle est aussi que chacun de nous est appelé à devenir une « maison du Seigneur », parce que Dieu veut faire en nous sa demeure, d’où sa bonté puisse se diffuser dans le monde à travers nos actes, et l’humanité entière est appelée à devenir une « maison du Seigneur » et non à rester une masse en conflit ou en tension. Chacune, chacun de vous est appelé à s’habiter soi-même mais non pas pour se retrouver seul en soi, mais ouverte ou ouvert à tous et à Dieu, à Dieu et à tous.

Chers amis, vous qui allez être confirmés, vous êtes ici bien sûr par votre bonne volonté qui est aussi une volonté bonne ; vous êtes ici grâce à vos parents, grâce à votre lycée, à celles et ceux que vous avez rencontrés et qui vous ont donné le goût d’avancer dans la vie chrétienne. Mais vous êtes ici plus encore parce que Dieu vous a choisis et appelés. Dieu désire que chacune et chacun de vous soit un habitant de sa maison, que chacune et chacun de vous soit capable de faire de lui-même une maison où Dieu se trouve chez lui et que chacune et chacun de vous soit capable d’habiter ce vaste monde comme une « maison du Seigneur ». Dans les lettres que vous m’avez adressées, vous exprimez fortement votre volonté d’être bons, de prendre soin des autres, des autres hommes, des animaux, de l’univers en général, de tout ce qui peut être autre, de vivre dans le respect de l’autre. L’image de la « maison du Seigneur » peut vous y aider. Mais vous pressentez aussi que nous ne sommes pas « maison du Seigneur » absolument par nous-mêmes, par notre seule naissance ni par nos seules vertus. Cette maison mérite d’être rénovée, transformée, remise en ordre, purifiée, transfigurée. Il faut qu’y brille une lumière neuve, qui en fasse apparaître la beauté, et il faut qu’une lumière neuve nous soit donnée qui nous rende aptes à voir les autres et le vaste monde et nous-mêmes toujours comme une « maison du Seigneur ».

 Nous devons être conscients que bien des réalités cherchent à nous habiter, bien des forces, bien des paroles, bien des bruits en ce monde, qui peuvent venir remplir notre espace intérieur pour nous rendre esclaves d’eux. Le passage de l’évangile selon saint Jean que vous avez choisi ou qui a été choisi nous aide à le comprendre. Jésus nous appelle à l’aimer et il vérifie notre amour par notre fidélité à sa parole, parce que sa parole vient de plus grand que lui, elle vient du Père. En accueillant la parole de Jésus, en y étant fidèle, en la laissant habiter en nous, nous accueillons non seulement Jésus qui a dit cette parole mais le Père qui l’a envoyé porter cette parole jusqu’à nous. La parole de Jésus mérite d’être accueillie au cœur de notre cœur, à la racine de notre intelligence, de notre volonté, de notre mémoire, pour que, dans toutes les circonstances de notre vie, cette parole-là puisse retentir au moment opportun afin que nous choisissions le meilleur, ce qui nous fera davantage « maison du Seigneur ». Tel est le rôle de l’Esprit-Saint- : « Le Défenseur, l’Esprit-Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit. » L’Esprit-Saint est Défenseur : il nous aide à ne pas oublier Dieu qui vient à nous par sa parole, il inscrit les paroles de Jésus au plus intime de notre mémoire, pour qu’elle demeure en nous une parole vive, vivace, qui nous pousse à l’action, afin que nous nous rappelions toujours que nous sommes invités dans la « maison du Seigneur », ici-bas et pour toujours.

Saint Paul nous le dit très bien dans sa première lettre aux Corinthiens : « C’est dans un unique Esprit, en effet, que nous tous, Juifs ou païens, esclaves ou hommes libres, nous avons été baptisés pour former un seul corps. » L’immense diversité des humains est source d’inquiétudes, de méfiances, de peurs, de rivalités, de luttes, de guerres. Mais elle est surtout la promesse d’une communion qui va au-delà de la seule union des forces et des intérêts. Dans les suites des deux guerres mondiales, les peuples ont tâché de se donner des instruments d’unité politique, comme l’ONU ; ils ont appris à se connaître grâce au développement du tourisme et des échanges économiques ou commerciaux. Vous êtes les héritiers de ce grand effort. Mais vous sentez aussi la fragilité de ces constructions, si nous en restons aux moyens économiques ou politiques ou culturels. L’Esprit-Saint donné par Jésus, qu’il a acquis, lui, à travers le grand combat de sa mort et de sa résurrection, le pouvoir de l’enraciner au cœur de notre liberté à chacun, l’Esprit-Saint nous unit les uns aux autres à une profondeur que notre volonté et notre intelligence n’atteignent pas toujours mais pour que notre volonté et notre intelligence y trouvent leur source. C’est cela l’Église au sens le plus vrai de ce terme : les hommes et les femmes que Dieu rassemble dès ici-bas et unit à lui et en lui pour qu’ils soient le signe et la promesse de la communion éternelle à laquelle les humains sont invités, pour laquelle ils et elles sont faits. « Habiter la maison du Seigneur », c’est vivre en servant déjà cette communion.

Plusieurs d’entre vous ont été marqués par l’expérience de la mort. Entendez donc, entendons avec vous ce matin le psalmiste : « J’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants » et il conclue par cet appel : « Espère, sois fort et prends courage » car la « maison du Seigneur » n’est pas faite pour la corruption, elle est faite pour la vie, elle est faite pour la joie, elle est faite pour un rassemblement et une hospitalité qui n’auront pas de fin. L’Esprit-Saint vous est donné en sa plénitude pour que, dans les douleurs et les hésitations et les peurs de ce monde, vous ne doutiez pas être des « maisons du Seigneur », en route vers la grande maison de tous et pour des jours sans fin,

                                                                                    Amen.


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