Homélie du 8 décembre 2019, 2ème dimanche de l'Avent - L'Eglise Catholique à Reims et dans les Ardennes

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Publié le 9 décembre 2019

Homélie du 8 décembre 2019, 2ème dimanche de l’Avent

Homélie pour le 2ème dimanche de l’Avent, année A, le 8 décembre 2019, en l’église Sainte-Macre de Fismes, confirmation de jeunes et d’une adulte.

Le temps de l’Avent est le temps de la promesse. Les années qui passent ne font pas qu’user toute chose : elles nous rapprochent de l’accomplissement de la promesse de Dieu, en chacun de nous et en nous tous collectivement. Nous la connaissons bien, cette promesse, nous l’avons entendue à l’instant avec toute sa force : « Un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines. » De qui s’agit-il ? Que nous promet le prophète ? Un roi idéal pour Israël ? Sans doute mais, à y bien réfléchir, bien davantage encore, un homme, un être humain enfin digne du projet du Créateur, un être humain qui en méritera pleinement le nom et la dignité, car, en réalité, toute l’histoire biblique nous apprend progressivement que le roi, la reine, sont tout membre du peuple de Dieu ; chacun étant revêtu de la liberté royale. Or, que fait le roi selon Dieu ? « Il ne jugera pas sur l’apparence ; il ne se prononcera pas sur des rumeurs. Il jugera les petits avec justice ; avec droiture, il se prononcera en faveur des humbles du pays. » Nous pouvons entendre ces paroles d’un roi ou d’un responsable politique, de quelque manière qu’on le nomme, mais en réalité chacun de nous, tout être humain porte un jugement sur les autres, doit se déterminer pour entrer en relation d’amitié ou pour se méfier, pour faire du bien à l’autre ou pour chercher à le priver de ce qu’il pourrait réclamer pour lui. L’être humain annoncé par le prophète, l’homme nouveau, celui qui est selon le dessein de Dieu, n’est pas quelqu’un qui domine, qui écrase, qui conquiert, qui accapare, qui accumule. L’homme nouveau que vise le Dieu vivant est quelqu’un qui juge avec sagesse et discernement, qui sait faire du bien à chacun et à chacune ; l’homme nouveau ne se laisse pas aveugler par ses passions et par ses besoins mais sait choisir de se mettre au service de la vie des autres.

De bien des côtés, nous entendons parler de l’homme augmenté ou du transhumanisme qui ferait les hommes et les femmes supérieurs à ce qu’ils sont aujourd’hui. Peut-être peut-on ou pourra-t-on augmenter les capacités des êtres humains à faire face au froid ou au chaud ou au bruit, à capter des sons ou à reconnaître des lumières ; peut-être peut-on ou pourra-t-on accroître la mémoire ou la capacité de calcul des êtres humains, ou, peut-être plus simplement, les doter de jambes plus performantes ou de bras plus puissants. Mais nous, frères et sœurs, nous qui recevons la promesse divine, nous savons et nous devrons toujours savoir que la seule augmentation qui vaille vraiment, celle qui peut valoir pour la vie éternelle, c’est l’augmentation de la capacité de juger, c’est-à-dire de déterminer ce qu’il est juste et bon de faire, ce qui va conduire à rendre tous les autres davantage vivants, davantage porteurs de vie.

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Nous avons la grâce ce matin d’entourer nos amis qui se présentent pour recevoir le sacrement de confirmation : trois sont des jeunes encore, deux sont des adultes. Tous ont bien réfléchi, ils se sont préparés avec soin, ils se sont laissés conduire au long du chemin nécessaire pour se présenter au milieu de nous et s’approcher de Dieu en lui demandant de confirmer en eux la dignité de fils ou de filles de Dieu. Chers amis, vous le savez bien : la prophétie d’Isaïe qui a été proclamée pour nous en ce dimanche de l’Avent vaut avant tout pour Jésus, mais Jésus est venu pour que cette prophétie vaille pour quiconque met sa foi en lui. En vous donc va désormais reposer l’Esprit du Seigneur : « esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur », l’Esprit aux sept dons. Il va reposer sur vous pour que vous soyez des hommes nouveaux, des femmes nouvelles. Il ne vient pas augmenter en vous telle ou telle performance ou telle ou telle compétence, il vient dilater votre intelligence, votre volonté, votre mémoire, pour que vous puissiez mener votre vie avec pour horizon la promesse de Dieu, la promesse de la vie éternelle à laquelle tous sont appelés. Car l’être humain tel que Dieu l’a voulu et le veut n’est pas le prédateur, ni le consommateur, ni le pollueur, ni l’orgueilleux qui veut tout ramener à lui, ni l’égoïste qui s’inquiète pour ses besoins et ses désirs : il est celui ou celle qui sait regarder, écouter, choisir, ce qui peut être bon pour tous, ce qui peut être meilleur pour ceux qui lui sont confiés, ce qui peut servir la paix et la fraternité entre les êtres humains et entre tous les êtres, et qui fait cela jusqu’au bout, qui s’y engage sans réserve, sans ressentiment, sans jalousie, non par contrainte mais de bon cœur, joyeusement, plein d’espérance. « Le loup habitera avec l’agneau, le léopard se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble, un petit garçon les conduira ».

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Alors, pourquoi entendre Jean le Baptiste et ses paroles si fortes mais qui sonnent à nos oreilles peut-être de manière désagréable. Pourquoi nous faire entendre ces menaces aux Pharisiens et aux Saducéens : « Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu » ? Jean le Baptiste se représente comme il veut ou comme il peut le Messie, celui que Dieu envoie et qui vient empli de l’Esprit de Dieu. Nous, nous connaissons celui qui est venu. Il n’est pas venu avec une hache à la main, ni un feu pour détruire, ni une pelle à vanner pour trier. Il est venu comme un petit enfant couché dans une mangeoire, et d’abord comme un enfant qui se forme dans le sein de sa mère. Il est venu comme un petit des hommes qui a besoin de l’aide et du respect et de l’attention de beaucoup pour pouvoir grandir pleinement. Ou plutôt : en grandissant, il a certes apporté un feu, mais non pas celui du châtiment ; il a apporté le feu de son Esprit-Saint qui vient transfigurer nos capacités humaines ; il a certes abattu les arbres qui ne portent pas de fruit mais ce fut pour se laisser clouer dessus d’abord et pour dévoiler la dureté de nos cœurs, la sclérose de nos âmes, afin de les guérir et de les libérer ; il n’est pas venu pour contraindre tous les êtres humains par la force de sa parole mais plutôt pour que ses paroles puissent doucement habiter le cœur de chacun et y faire grandir la foi, l’espérance et la charité. Jean le Baptiste est le dernier des prophètes et sans doute le plus grand, mais ce qu’il annonce ne vient pas exactement comme il le décrivait parce que le Dieu vivant tient, lui, ses promesses. Il vient lui-même jusqu’à nous pour conduire les êtres humains à la vie en plénitude et pour ouvrir un chemin de vie devant les plus enfermés dans la mort et dans le péché. Cependant, Jean le Baptiste nous est nécessaire : il dénonce la tentation de la fausse conversion ; il nous interdit d’imaginer que l’on puisse tromper Dieu.

Chers amis, à l’âge où vous êtes vous avez fait l’expérience qu’il y a en vous de grands et beaux et saints désirs mais aussi des passions et des pulsions dont vous n’êtes pas toujours fiers mais que vous ne parvenez pas toujours à maîtriser ou à harmoniser. La colère, la jalousie, la paresse, les concupiscences diverses vous traversent et, parfois, elles vous poussent là où vous ne voudriez pas, elles vous entraînent à des actes que vous regrettez aussitôt qu’ils sont faits. Jésus vient précisément pour cela : il nous assure que les faiblesses et les fautes ne sont pas le plus décisif en nous ; il vient, lui, se mettre tout entier dans la balance et il vous donne son Esprit de sainteté pour que vous ne vous laissiez jamais décourager dans votre chemin. Saint Paul nous l’a dit : « Tout ce qui a été écrit à l’avance dans les livres saints l’a été pour nous instruire, afin que, grâce à la persévérance et au réconfort des Écritures, nous ayons l’espérance ». Certes, vous êtes et nous sommes avec vous des pécheurs dont tous les actes ne peuvent plaire à Dieu, mais non, vous n’êtes pas que cela ni d’abord cela et nous non plus. Plus important, plus vrai encore, plus nous-mêmes encore est en nous l’Esprit-Saint qui nous est donné et qui est scellé en nous par la croix du Christ et sa résurrection. Alors, chers amis, et vous tous, frères et sœurs, osez croire que, par votre vie, vous pouvez rendre gloire à Dieu, vous pouvez accomplir la promesse que vous êtes chacun, la promesse pour tous les autres, la promesse pour Dieu. Comme le dit l’Apôtre : « Accueillez-vous les uns les autres, comme le Christ vous a accueillis pour la gloire de Dieu ». Ce matin et pour toujours, le Christ Jésus vous accueille et vous comble de son Esprit-Saint. Vivez dans cette force car, selon la prédication de Jean le Baptiste : « Le Royaume des Cieux est tout proche »,

Amen
+ Éric de Moulins-Beaufort


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