Homélie des obsèques du Père Louis Thibault le 18 juillet 2022 en la basilique Saint-Remi de Reims - L'Eglise Catholique à Reims et dans les Ardennes

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Homélie des obsèques du Père Louis Thibault le 18 juillet 2022 en la basilique Saint-Remi de Reims

Salutation d’ouverture des obsèques du Père Louis-Joseph THIBAULT, adressée par Mgr Éric de Moulins-Beaufort, lue par le père Jean Larghi

Frères et Sœurs,

En retraite pour huit jours à l’abbaye de Fontgombault, je vous assure de ma communion profonde avec vous tous qui êtes rassemblés pour confier à Dieu, notre frère, le Père Louis Thibault.

Je ne l’ai connu que pensionnaire de la Maison Nicolas-Roland, bien malade et empêché de communiquer, et pourtant, dans chaque contact que nous avons eu, j’ai été impressionné par la force de sa présence, de sa confiance en Dieu et de son attention au monde.

Encore le Jeudi-Saint dernier, lorsque je lui ai apporté le Corps du Christ, son « Amen » a sonné fort et clair.

Vous tous l’avez connu autrement, dans la force de sa jeunesse et le déploiement actif de son sacerdoce. Vous savez qu’il est resté jusqu’au bout le prêtre de Jésus-Christ qu’il avait choisi d’être et consenti à être.

Nous le remettons avec confiance au Père des miséricordes, à l’action puissante du Seigneur Jésus qui est « la Résurrection et la Vie » et à l’Esprit-Saint, notre Défenseur et notre Consolateur.

Que Dieu lui permette d’intercéder pour notre diocèse, en particulier pour que nous recevions les prêtres et les religieux et religieuses dont nous avons besoin.

Que des jeunes découvrent la joie de consacrer leur vie pour le service du Christ Jésus et de son Église.

A vous tous, j’exprime ma gratitude pour votre présence fidèle auprès des prêtres âgés ou malades et pour la fidélité de votre gratitude.

Que Dieu vous en bénisse,

+Eric de Moulins-Beaufort

Homélie du Père Thierry BETTLER aux obsèques du père Louis-Joseph THIBAULT prononcée par le père Jean LARGHI

Les Écritures ne le cachent pas. Tous les récits des apparitions du Ressuscité, d’une manière ou d’une autre, le rapportent. Ce n’est pas d’abord en regardant avec leurs yeux que les premiers témoins de la résurrection ont pu voir le Seigneur, mais avec leur cœur, en puisant au fond de leur foi naissante…

Pierre, arrivé le premier au tombeau regarde tout, mais ne voit rien. C’est l’autre disciple qui voit car il croit en la parole qui annonçait la résurrection. Marie-Madelaine pense voir le jardinier, mais ne reconnait son Seigneur qu’au son de sa voix, lorsqu’il prononce son nom.

Et que dire des autres, dont les disciples sur le chemin d’Emmaüs dont nous venons d’entendre le récit ? Pendant toute la route, alors que le jour est dans sa plénitude, et qu’ils l’ont sous leurs yeux, ils ne le voient pas. Ils ne le reconnaissent pas. C’est lorsque le « jour baisse », alors même qu’il « disparut à leurs regards » écrit Luc, que la présence du Ressuscité s’impose à eux comme une évidence.

Là aussi, c’est la Parole qui fait naître la foi, celle des Écritures, celle du Seigneur lui-même qui résonne encore dans leur cœur tout brûlant. Et c’est au signe de la fraction du pain, lorsqu’il dira la bénédiction, qu’ils recevront la force de l’évidence, et celle de repartir, d’en être les témoins :

Le Seigneur est réellement ressuscité ! « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » dira Jésus à Thomas.

Le Père Louis Thibault a vécu, à sa manière, et dans son histoire, le paradoxe de la foi. La foi nait, non de l’observation des choses, mais de l’écoute et de l’accueil de la parole. Elle nait dans le cœur. Seulement après les yeux peuvent voir. Un croyant n’est pas un voyeur. Il devient voyant. Et Louis (Loulou disons-nous) a appris à devenir voyant, jusqu’à l’épreuve dans sa chair.
Ceux qui l’ont accompagné savent combien cela n’a pas toujours été facile.

Louis aura été un prêtre incardiné, profondément enraciné dans un territoire et attaché à sa population. On a évoqué son ministère, sa famille et le village de Méry-Prémecy ; le quartier du Sacré-Cœur surtout ; son passage par les Ardennes, la Vallée où, comme tous ceux qui y ont été en mission, y ont laissé une part de leur cœur de pasteur. J’en suis, à sa suite.

Ce n’était pas tant les institutions ou les grandes organisations pastorales qui l’intéressaient, mais les personnes. Cela est marquant : Il évoquait toujours quelqu’un par ses liens familiaux, « c’est le fils untel », son travail, ou simplement son adresse, son voisinage. Et surtout, Louis avait reçu le charisme particulier d’être présent et attentif au monde des personnes handicapées. Mais le Seigneur attendait plus encore de lui. Il eut à connaitre lui-même les limites de l’handicap.

En équipe avec lui à la paroisse St-Pierre – St-François d’Assise, j’en fus le témoin. Il lui fallut d’abord accepter de ne plus conduire son automobile. Une décision lourde de conséquences.

Puis sont venus d’autres renoncements qui le conduisirent d’abord à quitter le logement qui est au-dessus de l’église St-François, pour rejoindre la résidence Arfo des Châtillons. Un abandon réel. Mais il le fit avec nous, en équipe, résolu à y vivre son ministère de prêtre, au milieu des résidents.

Je me souviens alors de sa première machine à lire, un scanner couplé avec un ordinateur qui lui permettait de lire le journal l’Union, ou la revue Reims Ardennes. Il nous la montrait comme un enfant qui s’enthousiasme avec un nouveau jouet. Mais cela cachait mal l’épreuve et les difficultés qui lui était demandées. Il cherchait à rester fidèle à son ordination.

À certains chrétiens qui parfois considéraient trop vite Louis comme un prêtre âgé, retraité, j’ai été plusieurs fois obligé de dire qu’il n’était pas un vieux prêtre, mais un prêtre handicapé.

Aujourd’hui, je veux avec vous, lui rendre hommage.

Louis a su, avec ce que le Seigneur lui demandait de vivre, jusqu’au bout être pour nous un témoin du Christ en l’inscrivant dans son humanité. Même si cela ne fut pas toujours facile. Et, un jour, il a bien fallu prendre la décision de rejoindre la Résidence Nicolas Roland où là, la maladie continua son œuvre…

C’est là que j’ai compris que Louis, s’il n’était plus un « regardant », la cécité devenant complète, n’en restait pas moins, peut-être plus, un « voyant ». Qui l’a vu là, célébrer tant qu’il pouvait à la chapelle, me comprend. Quand on venait vers lui, s’approchant en disant : « Loulou, c’est Thierry », et voir alors son visage s’éclairer, on devine un peu comment c’est de la Parole et du son de la voix que nait une vraie relation.

Et peut-être ai-je deviné là, en tous cas entrevu un peu de sa relation intime avec le Ressuscité qui, comme pour les disciples dans l’auberge d’Emmaüs, alors que le jour baisse, alors qu’il disparaissait de leur regard, était plus que jamais présent avec eux, au plus intime. On le devine. Le Seigneur seul le sait.

Nous avons entendu l’Apôtre Paul bénir Dieu, « le Père plein de tendresse », pour le réconfort qui lui était donné dans ses détresses. Il y a là quelque chose de profond qui dit la foi de notre frère. Dans ses épreuves, Louis apportait de quoi réconforter les autres dans leurs propres épreuves, probablement, et je cite là l’Apôtre, « grâce au réconfort que nous recevons nous-mêmes de Dieu. » Même si, avouons-le, cela ne gommait en rien son humanité, parfois exigeante pour les autres, et où la maladie gommait chaque jour un peu plus les traits d’un tempérant enjoué et blagueur.


Avec vous aujourd’hui, et avec Louis qui « voit » dans la pleine lumière son Seigneur, que nous sachions dire comme l’Apôtre :

« Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ,

le Père plein de tendresse, le Dieu de qui vient tout réconfort.

Dans toutes nos détresses, il nous réconforte ;

ainsi, nous pouvons réconforter tous ceux qui sont dans la détresse,

grâce au réconfort que nous recevons nous-mêmes de Dieu. » Amen.


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